La France, les Etats-Unis et l’Algérie ont ajouté mardi 11 janvier à la pression exercée par les Etats ouest-africains sur la junte malienne pour qu’elle se plie à l’exigence d’un retour rapide des civils au pouvoir.
La junte tente de rallier les Maliens autour d’un discours patriotique et les appelle à manifester vendredi contre les sanctions imposées par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Ce dernier a décrété dimanche la fermeture des frontières avec le Mali et un embargo commercial et financier, sanctionnant durement le projet de la junte de continuer à diriger le pays pendant plusieurs années.
L’effet de ces mesures de rétorsion sur la junte, mais aussi sur la population, ajoute à l’incertitude de l’avenir dans un pays au cœur de l’instabilité sahélienne, théâtre de deux putschs depuis 2020.
Le président Emmanuel Macron a assuré que la France et l’Union européenne, dont son pays assure la présidence tournante, soutenaient le « Position très claire et ferme » de la CEDEAO face « Les dérives de la junte ». Les Européens s’apprêtent à renforcer leurs sanctions à leur tour, a-t-il dit. Mais un texte du Conseil de sécurité de l’ONU soutenant les sanctions de la CEDEAO, proposé par la France, a été bloqué mardi par la Russie et la Chine.
« Vol devant la junte »
Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a accusé mardi les mercenaires du groupe russe Wagner de » soutenir « la junte au pouvoir au Mali sous couvert de lutte anti-jihadiste. « Ce qui se passe au Mali est une véritable fuite en avant de la junte au pouvoir qui, au mépris de ses engagements, souhaite confisquer le pouvoir depuis des années et priver le peuple malien de ses choix démocratiques », il ajouta.
Les Etats-Unis soutiennent également les sanctions ouest-africaines, a déclaré son ambassadrice auprès de l’ONU, Linda Thomas-Greenfield, lors d’une réunion du Conseil de sécurité.
Un délai de cinq ans, comme demandé par les colonels pour remettre aux civils, « Prolonge la douleur » Les Maliens, plongés dans une profonde crise sécuritaire et politique depuis le déclenchement de l’indépendance et des insurrections djihadistes en 2012, a-t-elle souligné.
Le voisin algérien, autre allié essentiel, a encouragé les militaires maliens à « Une attitude responsable et constructive ». Le président algérien Abdelmadjid Tebboune juges « Une période de transition raisonnable et justifiable d’une durée ferme de douze à seize mois », ont indiqué ses services dans un communiqué.
« Caractère illégitime, illégal et inhumain »
Les autorités maliennes, de leur côté, s’emparent de la défense de la patrie et de sa souveraineté, et appellent au ralliement. « Le moment est venu pour tous les Maliens de se rassembler sans exclusivité pour réaffirmer nos positions de principe et défendre notre patrie », a déclaré lundi soir dans un discours à la nation le colonel Assimi Goïta, porté à la tête du Mali par un premier coup d’État en août 2020 et intronisé président « De la transition » après une seconde en mai 2021.
Le colonel Goïta et le gouvernement ont une nouvelle fois fustigé les décisions de la CEDEAO, en « Caractère illégitime, illégal et inhumain » selon le premier.
L’embargo imposé par la CEDEAO, hors produits de première nécessité, fait craindre l’inflation et les pénuries dans un pays pauvre et enclavé, touché par les violences de toutes sortes et la pandémie de Covid-19.
Le gouvernement a accusé la CEDEAO de se laisser « Instrumentaliser par des puissances extra-régionales », une référence claire à certains partenaires internationaux, dont la France, qui est militairement engagée au Sahel mais avec laquelle les relations se sont sérieusement dégradées depuis 2020.
« Un plan de réponse »
Jusqu’à mardi, très peu de voix se sont élevées, au Mali même, pour critiquer la junte. Une coalition de partis maliens, le Cadre Exchange, a brisé cette réserve en faisant la junte « La seule et unique responsabilité » Les sanctions.
Épreuve de force temporaire ou durable, les intentions de la junte sont inconnues. « Le Mali reste ouvert au dialogue avec la CEDEAO pour trouver un consensus », a déclaré le colonel Goïta. Mais ni lui ni le gouvernement n’ont pour l’instant offert de perspective de sortie de crise. Au contraire, le gouvernement a fait part de son intention de développer « Un plan de réponse ».
Les colonels s’étaient engagés en 2020 à rendre le contrôle aux civils après dix-huit mois. Ils disent maintenant qu’ils ne sont pas en mesure de respecter la date limite du 27 février 2022 pour la tenue d’élections. Ils citent l’insécurité persistante dans le pays et la nécessité de réformes préalables pour que les élections ne souffrent pas de contestation, comme les précédentes.
Pour ne rien manquer de l’actualité africaine, abonnez-vous à la newsletter de Monde Afrique à partir de ce lien. Tous les samedis à 6h, retrouvez une semaine d’actualités et de débats traités par la rédaction de Monde Afrique.